En désignant le 28 mai dernier l’église St-Joseph comme patrimoniale, le conseil municipal d’Ottawa a suscité à la fois la fierté et le mécontentement à Orléans.
Nicole Fortier, la présidente de la Société franco-ontarienne du patrimoine et de l’histoire d’Orléans (SFOPHO), présente les faits : la SFOPHO travaille sur le dossier depuis 2012, « mais sans succès parce que le diocèse s’y opposait », ajoute Mme Fortier.
En 2024, le Gouvernement de l’Ontario met un moratoire de cinq ans sur les désignations patrimoniales en vertu de la Loi sur le patrimoine de l’Ontario à compter du 31 décembre 2024.
Dès lors, la SFOPHO communique avec la Ville d’Ottawa et demande à ce qu’Orléans soit considérée parmi les désignations que la Ville d’Ottawa entendait faire avant le
31 décembre 2024.
« La Ville d’Ottawa, poursuit Mme Fortier, a immédiatement reconnu que les édifices d’Orléans devaient être considérés parmi les désignations à effectuer. » Ottawa et la SFOPHO s’entendent alors pour que l’église Saint-Joseph construite en 1922 et son presbytère datant, lui, de 1891, soient perçus comme patrimoniaux.
Contactée quelques jours après la décision des élus municipaux, Nicole Fortier était évidemment ravie : « C’est une excellente nouvelle ! Ça rassure les francophones, les francophiles et même les anglophones. »
Au courant que l’archidiocèse d’Ottawa-Cornwall est plus ou moins chaud face à la décision rendue par la Ville d’Ottawa en raison des obligations budgétaires qu’impose le nouveau statut en cas de rénovation, Mme Fortier rétorque « qu’il faut garder en tête que l’église, maintenant classée patrimoniale, permet d’obtenir des subventions de la ville. »
Jusqu’à 75 000 $ selon des documents obtenus de la Ville d’Ottawa.
De plus, Lesley Collins, gestionnaire de programme à la Planification du patrimoine, a précisé à L’Orléanais que « le personnel appuie généralement les améliorations et les modifications qui visent un bâtiment, pourvu qu’elles respectent les politiques et les principes de conservation établis. »
Monsieur le Curé se prononce
L’abbé Apollinaire Ntamabyaliro est curé de la paroisse St-Joseph d’Orléans. D’entrée de jeu, il tient à préciser que la nomination de l’église comme immeuble patrimonial est une bonne nouvelle. « Les gens peuvent être fiers »,
dit-il au téléphone. « Mais, en définitive, quel en est l’avantage? Le titre, oui. Mais après? »
Là où le bât blesse, ce sont les contraintes inhérentes au statut patrimonial. Celui qu’on appelle affectueusement l’abbé Apollinaire donne l’exemple de Rome où il a exercé son sacerdoce avant Ottawa. « Quand une église est classée patrimoniale, là-bas, c’est la commune qui va la prendre en charge. Donc, elle va payer lorsqu’il y a des rénovations. Mais ce n’est pas comme ça ici. » Au final, ce sont les paroissiens qui devront débourser.
N’ignorant pas qu’il y a des subventions qui peuvent être obtenues de la part de la ville, M. Ntamabyaliro donne l’exemple d’un projecteur qui doit être remplacé. « Il en coûte 20 000 $. Si notre subvention est de 30 000 $,
il en restera combien pour la toiture ou la cheminée? »
Le curé de la paroisse avoue également que lui et certains membres de l’archevêché auraient aimé être mis au courant de ce qui se tramait.
Pourtant, d’après un rapport transmis au journaliste de L’Orléanais par le service des relations avec les médias de la Ville d’Ottawa, de l’information semble avoir été transmise entre les parties. « Depuis l’automne 2024, l’équipe de la Direction de la planification du patrimoine échange de la correspondance avec l’Archidiocèse catholique romain à propos de la désignation de plusieurs églises catholiques anciennes et modernes. On a constaté qu’il fallait prioriser la désignation de l’église Saint-François-d’Assise et de l’église Saint-Joseph d’Orléans. » C’est ce qu’on peut lire dans un rapport soumis au Comité du patrimoine bâti le 13 mai 2025 et au Conseil municipal le 28 mai 2025.
Un projet au purgatoire ?
« Toute personne s’opposant à la désignation proposée doit faire part de son opposition au greffe municipal, par écrit, dans les 30 jours suivant la publication de l’avis. » C’est ce que disent les règlements municipaux à la suite d’une décision prise concernant l’attribution d’un statut patrimonial.
Ce délai de 30 jours, l’abbé Ntamabyaliro l’a mentionné à L’Orléanais. La paroisse en usera-t-elle? Une réunion avec les conseillers Matthew Luloff et Laura Dudas devait avoir lieu le 20 juin pour discuter de la question.
Malheureusement, heure de tombée oblige, il a été impossible malgré nos demandes d’avoir les commentaires de M. le curé à la suite de cette rencontre.